23 février 2009

La Musique est en nous

Oliver SACKS, neurologue qui a écrit le fameux "L'homme qui prenait sa femme pour un chapeau", vient de sortir un nouvel ouvrage, "Musicophilia", où il montre que la musique ouvre des portes insoupçonnées sur le fonctionnement du cerveau. Du coup, plusieurs magazines en parlent, dont Telerama, Psychologies magazine, et Sciences et avenir entre autres. Tout ce qui est écrit ci-dessous vient de ces trois sources.

Dans Psycho, on apprends que la musique apaise nos tensions, berce nos souvenirs, nous rend intelligents et peut même nous guérir !
"A quoi bon fréquenter Platon, quand un saxophone peut aussi nous faire entrevoir un autre monde ?" se demande Cioran dans Syllogismes de l'amertume. La musique, selon une étude suisse, nous suggère différentes émotions : l'émerveillement, la puissance, la nostalgie, la transcendance, le calme, la joie, la tendresse, la tristesse et l'agitation. A l'inverse, la culpabilité, la honte ou le dégoût ne sont pas évoqués.

Certaines mélodies, rythmiques, voix, harmonies... aident à supporter toutes sortes d'épreuves au quotidien. "Nous projetons nos tensions désagréables dans la mélodie au lieu de nous en vouloir ou d'en vouloir aux autres", explique Edith Lecourt, psychanalyste et musicothérapeute.
La musique stimule nos sensations les plus agréables, un peu comme lors d'un échange amoureux : une étude menée par des chercheurs de l'université canadienne Mc Gill, à Montréal, a d'ailleurs montré que la musique activait dans le cerveau les "centres de récompense" généralement associés aux plaisirs de la bouche et du sexe.
La musique accompagne aussi nos moments moins heureux. Réaction humaine et pas aussi masochiste qu'elle en a l'air, au contraire : "Ecouter des airs mélancoliques dans ses moments de tristesse, c'est aiguiser, entretenir et scénariser sa propre douleur, avance le psychanalyste Didier Lauru. Avec une musique pour l'accompagner, la souffrance ne tourne plus en circuit fermé. Elle trouve un écho et, par cette communion, s'en trouve soulagée".

Pour Nietzsche, "la vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil". Pour Psychologies, "la musique correspond à un éveil, elle ouvre un espace où les émotions ressenties sont susceptibles d'élargir notre champ de pensée".

Dans ce magazine, on peut lire que la musique peut agir comme une madeleine de Proust selon Didier Lauru. "Elle peut nous renvoyer à certaines harmonies entendues pendant l'enfance et nous projeter aussitôt dans l'état d'esprit dans lequel nous étions alors. Parce que nos émotions s'arriment à des mélodies, définitivement et souvent à notre insu. Rares sont les arts qui permettent une telle plongée dans l'inconscient."
La musique est cette possibilité précieuse que nous négligeons trop souvent, alors qu'elle nous permet de vivre profondément nos émotions, dont celles que nous refoulons dans la vie sociale.

Si certaines personnes se sentent "amusicales", ce n'est qu'une illusion : tout le monde serait sensible à la musique. Seulement, parce qu'ils n'ont jamais entendu une musique qui faisait sens pour eux, ou parce qu'ils associent la musique à un souvenir traumatique, certains pensent ne pas y être sensible.

Pour Oliver Sacks, "l'espèce humaine est musicale. La musique nous fait vivre des expériences diverses : elle nous apaise, nous stimule, nous réconforte, nous rend mystiques et, souvent, nous hante. Elle a la capacité de nous tirer de la dépression ou de nous émouvoir jusqu'aux larmes."
Il a fait une mauvaise chute qui l'a laissé paralysé d'une jambe. Il a eu du mal à réussir à marcher à nouveau... jusqu'à ce qu'une musique lui arrive en tête. "La mélodie semblait animée d'une énergie singulière et, en un instant, je recouvrai le rythme perdu de la marche, comme s'il m'était revenu un air autrefois familier mais oublié".

Telerama écrit que les avancées des sciences cognitives et de la meuro-imagerie permettent maintenant de se repérer avec une grande sophistication dans les labyrinthes de l'activité cérébrale. "Les spécialistes peineraient encore aujourd'hui à distinguer le cerveau d'un peintre, d'un écrivain ou d'un mathématicien, affirme Sacks. Mais ils reconnaîtraient sans hésitation celui d'un musicien..."

Des patients "intensément parkinsoniens" bougeaient parfois "avec une grâce et une aisance qui semblaient démentir leur parkinsonisme" et la musique était le puissant déclencheur de ces mouvements. "Des individus qui n'auraient fait aucun pas sans aide pouvaient être amenés à danser, écrit Sacks dans Musicophilia. Ceux qui étaient incapables de prononcer la moindre syllable ou dont la voix faible et monocorde sembalit émaner d'un spectre, chantait parfois d'une voix forte et claire, avec toute la puissance, toute la richesse d'expression et la délicatesse d'intonation requises..."

La musique est profondément ancrée en nous : "La mémoire musicale semble l'accès le plus direct à notre moi profond. Je le constate avec les malades atteints d'Alzheimer, raconte Sacks. Ils sont capables, quand ils ont tout oublié, de retrouver des chansons populaires, et les émotions et souvenirs qui leur sont associés".
Pour Sacks, "Une attaque cérébrale peut par exemple provoquer l'aphasie -l'incapacité à utiliser ou à comprendre des mots. Mais le même patient sera rarement dans l'incapacité de chanter des mots. Grâce au chant, il est même possible de rappeler au patient des pans entiers de mots qu'il a oubliés. Des circuits neuronaux anciens peuvent ainsi être réactivés, ou de nouveaux être tracés, qui le conduiront jusqu'au langage".

Pour conclure, Sacks dit également que, comme le langage, la musique est le propre de l'homme.
Alors... en avant la musique ! :D

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